livre des suites
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ici on peut attendre que s’essoufflent les...
9 juin 2020
ici on peut attendre que s'essoufflent les vagues grises du ciel, que le piano étreigne d'un baiser son ultime note, qu'il y ait au fond de ma cage un petit clou amoindri dans l'os, que je sente chaque mot gratter ma gorge pour dire plus serré plus tendu.
ici on peut attendre. on a le cul large à l'épousée du siège, la patience d'encre glissant sur le cahier, le silence long, pesant ou parfois léger selon l'oiseau qui passe et revient (...)
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La Terre parfois s’arrête la nuit en secret. Ce...
29 mai 2020
La Terre parfois s’arrête la nuit en secret. Ce matin, elle roule lentement sur elle-même. Démarrage en côte, petit braquet. Elle ne peut pas se mettre en danseuse. Le vent est petit, ne coiffe ni ne décoiffe. Il y a jusqu’à midi, une alpée de soleil à se taper. Et ces lacets d’heure en heure, ce maillot bleu à mouiller, des monts de midi à conquérir. Lentement pousser sur les pédales, s’arracher à l’immobile. Ensuite c’est un sacré effort de (...)
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Lundi, le pré est en fleurs, je passe. La...
23 mai 2020
Lundi, le pré est en fleurs, je passe. La beauté est un parfum.
Mercredi, le pré est fané, je passe. L’odeur du soleil dort dans l’herbe fauchée.
Vendredi, le pré est éventré, je passe. Des ourlets tout enterrés brodent le sol.
Dimanche, le pré est tissé, je passe. On a semé le secret de la saison.
Dans une heure il pleut, c’est ce qu’on me dit. Une heure de soleil et soudain le ciel aura changé. Je suis prête sous le bleu. Mon parapluie est (...)
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Nous avons partagé en deux le jour, la nuit en...
18 mai 2020
Nous avons partagé
en deux le jour, la nuit
en deux lumière, l'ombre
en deux, mon corps, miroir
en deux le dire bien, et mal
en deux la vie, la mort
mais au centre
dans le cœur noir
de ma chair
dans chaque mot
une pierre, seule
en son unique cœur
l'ignorance terrible de l'eau.
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Un automne égaré passe Déjà Artiste emballeur Ce...
6 mai 2020
Un automne égaré passe
Déjà
Artiste emballeur
Ce corps clouté a sa moelle de douleur
Ici, sens ma main
Qui fouille ma poitrine
Arrache cette pelote de gâchettes brûlantes
Les racines du feu
Exécute et vise bien
Je suis rebelle au désamour
Je ne plie pas au temps qui passe
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Je n’ai de nostalgie que des choses inconnues...
12 février 2020
Je n’ai de nostalgie que des choses inconnues
Des yourtes déposées dans mon lit par des soirs de racontars
De ce feu qui laisse monter vers les cimes des tipis d’ancêtres
De la main dans les racines crépues des moutons
Et de ta bouche écrivant sur le pays un poème d’ogre.
Mon rêve me donne des soubresauts et des sueurs de garce que l’aseptique drôlesse ignore
Je n’ai pas regrets
Mais ces touches manchotes des images de la nuit changent le temps (...)
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Quels bruits font mes nuits… Sous la dalle des...
7 février 2020
Quels bruits font mes nuits…
Sous la dalle des sommeils, la guerre reprend à guichet fermé
Je ne m’échappe que dans des falaises, des vertiges, glaciers grumeleux
Je pitonne l’espace
Je cherche à m’élever,
Mais dans la lumière
Je m’aplatis
Épousant le rampant commun
Je m’allonge, parole déloyale
Commune, rampante
Jusqu’à lécher le sol d’un lâche silence
Ni accroc, ni granit
Je rase le marbre des rêves
Pierre ponce, la langue
Élimée, (...)
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Des bruits nouveaux, transmission de tuyaux,...
1er février 2020
Des bruits nouveaux, transmission de tuyaux, les eaux qui arpentent les murs, araignées roteuses. Dialogue de radiateurs bavards et télégraphes. Le morse des fluides sécrétant des messages secrets. J’écoute et invente les raisons des profondeurs de remonter vers moi couvertes d’histoires et d’espions. On complote à la gargouille.
– La chambre vide découvre sa nouvelle passagère, une voyageuse venue par le roulis de la chaufferie, pour une (...)
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Comme l’aube, je frappe Mon front contre la...
25 janvier 2020
Comme l’aube, je frappe
Mon front contre la vitre froide de la lumière de janvier
Parle-moi, je demande.
La porte des tempes est close, je suis, le crâne cadenassé
Dans les cellules grises, il neige des idées qui tournent en rond
et usent les mots, sciure vaine
Qui sont ces fouteurs de glace, de nuit immortelle dans ma tête ?
Je frappe humblement contre ma fenêtre. Lumière lumière n’oublie pas de briser mes (...)
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Dans la maison que j’habite, des villes...
14 janvier 2020
Dans la maison que j’habite, des villes veillent, entières et rondes comme des fruits étoilés.
Les citadins fracassent mon unique fenêtre ; des chats, des renards déchirent les flaques et les détritus. Je suis assise là, sur la chaise d’un bistrot sans décor.
Je lève parfois les yeux jusqu’aux fentes des gratte-ciel. Une couleur factice baigne les toitures. Le ciel est vert, un pré sec, jaune d’un œil d’alligator.
Je promène mon corps, cette (...)