nouveau carnet propice à ouvrir un nouveau projet, une phase, une route nouvelle.

la marche assise du cahier en fait : une autre définition de l’écriture, un voyage sans trajet. les pages ici, nouvelles, blanches qui contiennent déjà, bien à l’avance de mon bruit, la parole qui s’y déposera. une épopée un simple bâillement. que sais-je ?

le cahier le sait lui bien avant moi. le bruit du bec de la plume traverse son épaisseur, une onde, une vague, quelque chose d’illisible simplement parce que ma vue est courte et mon ouïe bouchée de cérumen.

je griffe la page avec ce bec récalcitrant à l’encre, qui se cabre sous l’effort d’écrire. je griffe et c’est déjà un chant plus loin, le début d’un poème, ailleurs, modifié par d’autres becs dans le silence ou la blancheur encore des pages.

je pointe, je trace, je tache, je salis, je noircis, c’est ça écrire, un acte qui transgresse l’état des choses en transgressant l’état neutre des feuilles. je suis du doigt le fil de l’idée. elle se modifie et devient signes étales. et ainsi déposés, ceux -ci perforent les arbres couchés, les arbres lignés, les arbres lissés du carnet.

fermés un jour définitif, ces cahiers contiennent- retiennent le boucan, l’éruption, le langage pourrissant dans son jus, jamais lu, jamais sorti, jamais libre, de l’auteur injustifié que je suis, comme un fruit vert et mort à la branche de son arbre.