Journal poétique / www.jouyanna.ch

journal de l’aube 197

mardi 1er juillet 2014, par Anna Jouy

Il y a effectivement des matins où l’on se lève et c’est le dernier…Rien ne le distingue des autres, il a exactement la gueule de l’emploi, le même air de tenir la route, de devoir durer. Et pourtant c’est le dernier. Il a cet air frais, sa poudre bleue jetée aux regards et rien ne nous alerte. Rien, mais voilà c’est le dernier, le grand incognito qui passe et vous coupe la route. Queue de poisson et envoi dans le décor.
Il y a effectivement des repas derniers, des miettes dernières. Il y a des baisers derniers. Et puis son dernier mot. Parfois il est magnifique, il est sublime. Je t’aime. Parfois, c’est fou ce qu’il ressemble à rien. « A ce soir ! Ou je ferme derrière moi ? » Oui c’est ça …ferme derrière…
Il y a ce dernier paysage, cet ultime voyage, ce dernier bain dans la mer…Qu’il commence loin le mot dernier ! Il y a simplement un moment où il se met en branle et se met à faucher par petites touffes les gestes humains. Ceci n’est plus à faire, voilà qui est dit. Je l’imagine comme un point dans le domino géant qui tombe et la construction vite ou lente s’écroule pièce à pièce, resserrant autour de soi les derniers gestes compagnons de sa vie.
Il y a son dernier espace, le drap du lit, le platane de la route, le sol en lino qu’on a foulé mille fois, juste ce carré-là, où l’on s’écroule vaincu pour son dernier soupir.

Le bilan des trois derniers jours. Deux morts amis. Celui qui s’est battu ficelé dans son dernier combat, celui qui est tombé dans sa dernière partie de badminton. Et ici une hébétude que je crains ne pas être la dernière...

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