Journal poétique / www.jouyanna.ch

Je suis Anna. En réalité dans la vraie vie...

mercredi 26 janvier 2022, par Anna Jouy

Je suis Anna. En réalité dans la vraie vie qu’ils disent j’ai un autre prénom. Anna Jouy, c’est un pseudonyme. Ces temps, alors qu’Annaj vient de sortir un roman, dans le coin où j’habite, dans le monde que je fréquente, là où sont mes connaissances, mes camarades d’école, dans mon milieu quoi, je me rends compte qu’être un pseudonyme n’est guère vendeur. Je suis une inconnue, je ne suis pas d’ici, je suis hors caste des écrivants du coin. Mon nom de plume n’est personne, on ne peut pas dire c’est la fille à Machin, la cousine à Trucchose, la dame du quartier, la professeur d’autrefois...
Je n’ai que ma plume pour me faire lire, qu’elle pour trouver le chemin d’un lecteur, qu’elle pour éveiller l’intérêt. Mon nom véritable ouvrirait mon livre aux yeux de quelques curieux, mais je suis Anna Jouy, une écriture de personne.
Je me suis souvent dit que ce devrait être obligatoire, l’anonymat en écriture. Que chacun qui propose un livre à un éditeur lui arrive nu, sans son métier, son nom, sa notoriété littéraire ou pas. Qu’à partir d’un succès, d’un degré de popularité, il se remette en cause et redevienne le quêteux misérable qui espère être édité et qui espère être lu.

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Messages

  • ... une réflexion qui me trotte par la tête depuis si longtemps - plus encore depuis que j’écris - cette question d’ arriver ou pas avec son nom, son prénom, sa profession, sa forme de langage et même son CV sous le bras comme on porterait sur le front une étiquette propice aux interprétations faciles ou hâtives laissées trop souvent sans un droit de réponse... cette question d’arriver nu.e à chaque acte qui engage (ou pas), à chaque écrit à publier (impossible de ne pas penser à Romain Gary)... Sans nom, liberté de revendiquer ses contradictions quand elles paraissent des failles - alors qu’elles ne sont qu’une respiration, une amplification de soi... pour que le nom ne porte pas la trace du geste qui précède, il faudrait le changer à chaque geste... et la réflexion repart en sens inverse, ce désir de nom inconnu et sans trace, n’est-il pas déjà la trace de ce qui a besoin de se dire, de se revendiquer, de s’écrire ?... quel qu’il soit, chaque nom porté, - celui d’une vie vraie ou pas (vraie ? quelle vie est la vraie ?) porte déjà sa trace, ne serait-ce que celle de la raison pour laquelle un nom d’emprunt se choisit ou se refuse. ; tout fait trace, même les vies anonymes ou celles dont on choisit de préserver l’anonymat... et puisqu’il est question d’écrire et d’écriture, la question pourrait être - pourquoi écrivez-vous ? souvenir qu’Eric Pessan ait répondu que cette question-là n’est pas la bonne ; la bonne est pourquoi publiez-vous ? ; si la question du nom se pose, sans publication, plus de nom à choisir sous lequel être lu.e et finies les tergiversations ! il semble que nos contradictions nous poussent à vouloir parfois le beurre et l’argent du beurre - vouloir laisser une trace sans laisser trace, dire sans dire, danser sans activer le corps... si jamais il devait y en avoir une, la seule lâcheté à s’autoriser ne serait-elle pas de ne pas chercher à répondre à ce pourquoi publiez-vous ? - mais, au fond, lâcheté ? évitement ? ou droit de non-réponse ?, qui a celui de dire ? Juste écrire par besoin d’écrire comme certains ont celui de peindre, de chorégraphier, de sculpter ou d’escalader une montagne, juste écrire pour ce besoin de donner forme à des émotions, mettre de l’ordre dans le chaos du dedans, brûler l’énergie et publier pour passer à autre chose, enfin, et peu importe le nom.
    La pensée tourne-vire, capable de répondre aux questionnements par tout et son contraire... Alors, pour avoir existé un peu, un peu plus que celui qui n’a pas le corps pour danser, les mots pour dire, ne pas laisser partir ce talent que l’on porte en soi comme un totem monté on ne sait comment, juste assumer totalement toutes ses imperfections et ses contradictions.

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