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journal de l’aube 118

lundi 2 décembre 2013, par Anna Jouy

forte bise. le vent est jaune avant sa lente métamorphose en ciel. je l’entends. dialogue à soufflet avec l’arbre, les arbres, autour. il a tout à voir avec l’écriture, bien plus que la parole encore, aussi vrai et aussi insaisissable, aussi invisible et puissant. ils l’ont dit. Simon, Saint John-Perse...
le fragile, le friable, ce que je ressens lorsque je croise cette ombre dont "l’hombre" est depuis longtemps parti.
si nombreux en somme... ils n’ont plus rien de cette liberté qui les habitait, qui les rendait indispensables, qui surenchérissait leur vie d’une force avide et féroce. plus rien mais l’ombre, dernière demeure, comme pour donner le change, une forme lisse, un gris épais. et cette sensation d’un tas de sable qui ne cesse de tomber...

vous vous rappelez cet instant où vous avez su votre deuil irrémédiable et où votre cœur s’est mis à anticiper, comme pour mieux s’y habituer et s’y faire, leur mort compagne.

je sais que lui viendra, le seau d’un fleuve pour mes yeux, une nuit me retrouver et glisser dans mon ventre un ultime frisson. je sais déjà qu’il me laissera la mission d’aller au plus loin de mes larmes le chercher, le trouver. une autre vie, une autre histoire.

et puis viendra ma propre nuit, anticipée elle aussi, celle du jugement. n’avoir pas franchi les ronces, n’avoir pas brisé la forêt, et cela jusqu’à l’instant même où je passerai et où nous serons à nouveau en possession et de nos ombres et de nos corps

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