j’ai le choix du bruit
celui du pin qui frotte le toit d’une branche
celui de cette chaleur qui travaille la lampe et fait bégayer la lumière
la roue du vélo, cliquetis familier régulier, de loin le plus gros mangeur d’oreilles à cette heure
ces pas que j’imagine
le mouvement des chaises de métal quand les bêtes sauvages terminent leur festin de ténèbres
le bruit de la main sur le papier qui est doux et sifflant. presque aiguisé, lame de paume.

l’espace est symphonique dès le lever. solide multiple.
j’ai le sentiment d’enfreindre une loi, celle d’un monde où chaque bruit est une convention de mystères, un langage codé dont je n’ai rien à savoir. je tente de demeurer sage. ce n’est pas encore mon espace mais le terrain d’êtres vaquant à des tâches bien plus importantes...oh ! la frivolité musicale des morts !

n’est-ce pas ce qui se construit dans la nuit ? ces bruits de cathédrale , le dernier matériau du labeur : les disparus pointent dans ma maison.
j’entends et je gare mon âme à la stalle des gens du voyage.
je glisse dans la palissade de l’aube. je mincis en fil d’encre et je glisse mon mot dans le Mur des Lamentos